Michel DEVRIESE (SMD), fossoyeur de la médecine libérale (2)
QUESTION :
Bonjour Docteur Bourguignon,
Je souhaite que ceci reste “anonyme” entre-nous et vous prie de ne pas divulguer mon nom.
Quel horrible scandale !!! C’est innommable, scandaleux, pervers et lâche !!!
Je suis le docteur X et je vous envoie ce petit mail concernant la loi des 200 P.
En effet, mon épouse est orthodontiste spécialisée exclusive, ne pratique pas le tiers-payant, et n’a eu vent de cette règle que depuis quelques semaines.
Elle s’est renseignée un peu partout dans le milieu dentaire (prof d’univ, gros cabinets d’orthodontie, etc) et personne n’est au courant, même pas un seul de ses collègues dentistes et elle en connait des dizaines je peux vous le dire !!
En fait, elle a reçu son profil INAMI avec questionnaire sur son activité car elle plafonne au niveau des percentiles.
C’est comme cela qu’elle a eu des réponses plutôt inquiétantes de monsieur Devriese, président de la société de médecine dentaire, qu’elle a cru bon de contacter par mail pour s’informer, puisqu’il est censé défendre les praticiens.
C’est lui qui lui a dit de vérifier ses “P”. Mes “P “ ? C’est quoi ça ?
Mon épouse est de nature “bosseuse” et consciencieuse.
Elle a fait la dentisterie à l’UCL et ensuite une formation à temps plein de 4 ans en orthodontie (UCL).
Elle a progressivement développé un cabinet d’orthodontie privé, depuis environ …., je crois.
En quelques années, vu la demande énorme dans ce domaine et ses compétences largement reconnues par les dentistes de toute la région et même de bien plus loin, elle s’est vite retrouvée débordée.
Elle a donc engagé une secrétaire pour ne plus avoir à s’occuper des appels téléphoniques, des tracas administratifs,…
Ensuite, elle a engagé une assistante, lui permettant de gagner du temps et de maximiser son travail en bouche et la qualité de son travail, en délégant encore l’administratif, le nettoyage, la stérilisation, l’accueil des patients,…
Toujours surchargée, elle a pris conseil auprès d’un ami orthodontiste belge travaillant dans un gros cabinet dans le nord de la France (celui-ci travaille sur 4 à 5 fauteuils avec autant d’assistantes).
Elle a même engagé une société française de coaching spécialisée en orthodontie (pas gratuit !!) et le constat a été d’agrandir pour pouvoir faire deux cabinets avec deux assistantes au fauteuil.
Nous avons donc entièrement transformé le cabinet il y a environ 2-3 ans, avec, actuellement, 1 secrétaire, deux cabinets orthodontiques et deux assistantes au fauteuil (travaux de transformations colossaux !).
Mon épouse passe donc d’un cabinet à l’autre, pendant que l’assistante fait entrer le patient suivant, installe le patient, ouvre le dossier, prépare le matériel…
Son travail est donc vraiment maximisé au niveau de la qualité (elle ne fait quasiment plus que le vrai boulot d’orthodontiste en bouche et délègue tout ce qui est administratif et logistique).
Elle est bosseuse, des journées du type 8h00-20h00 avec 1/4h-30 min pour manger à midi, sont habituelles avec parfois une petite journée jusqu’à 16h00 (1x/sem). Elle travaille près de 6j/7 (samedi compris !)
En revanche, elle prend 9 semaines de congés/an (pendant les vacances scolaires, pour être avec les enfants).
Bref, elle plafonne dans les “P”. Quand on sait qu’une consultation code déjà pour 3P et qu’elle voit plus de 50-60 patients sur ses grosses journées, cela fait déjà près de 180 P. Ajoutez à cela les actes et voilà les P qui dépassent les quotas (>250-300) …
Elle en fait une dépression et elle a réellement la haine des personnes qui ont pondu une telle loi ne tenant compte de rien. Avoir bossé 9 ans d’études, développé un cabinet vraiment à la pointe au niveau du matériel, de la radio digitalisée, des infrastructures et avoir engagé 3 personnes et se voir ensuite accuser de fraudeur, car c’est clairement cela que l’on dit avec ce type de loi est proprement scandaleux, tout comme le fait de limiter l’activité d’un indépendant qui veut travailler, par amour de son métier et par ambition personnelle, est proprement scandaleux.
Le système est faussé car il ne tient pas compte des 9 semaines de congé, ni de l’aménagement des horaires (quelqu’un qui fait un mi-temps 3 jours/semaine serait sanctionnable et celui qui fait le même mi-temps, mais 6 demi-jours/semaine ne le serait pas), ni de l’organisation du cabinet avec secrétaire, assistante. On a vraiment l’impression, dans ce pays, que les gens qui bossent gênent des gens jaloux, frustrés qui n’ont probablement pas eu la carrure ou le courage de développer leur activité.
Mon épouse est persuadée de faire une dentisterie de loin meilleure qu’à ses débuts, maintenant qu’elle ne s’occupe plus du téléphone et de tout le reste, et qu’elle est aidée par deux assistantes.
Dire qu’elle devrait arrêter de travailler une fois les 200 P atteints pour renvoyer les patientes chez un confrère est proprement débile, car la demande est trop grande et tous les orthodontistes sont débordés, même ceux qui ont fait le choix de pratiquer à mi-temps ou autre.
S’il n’y a plus assez d’argent pour rembourser les soins, au lieu de claironner partout que les soins sont entièrement gratuits et de les faire payer ensuite au praticien qui bosse et sacrifie une grosse partie de sa vie familiale (nous avons 3 enfants !), il faudrait avoir le courage de dire que ces soins seront moins remboursés…
Actuellement, elle essaye de réorganiser son agenda, mais il est complet pour les 6 mois à venir (Eh oui l’orthodontie..).
Les jours où elle avait prévu de prendre congé, où elle avait bloqué son agenda, par-ci, par-là (un mercredi ou un jeudi), elle place actuellement 6-7 patients pour diminuer sa moyenne de “P”, comme le font quelques-uns de ses collègues “bosseurs”. Vous imaginer la connerie du système !!!
Elle va donc travailler moins (ce qui est bien au niveau familial), resserrer ses horaires, voir donc forcément moins de patients, ce qui va implacablement allonger les délais de RDV, et, qui sait, peut-être n’aura-t-elle plus besoin de tout ce personnel à long terme.
On encourage à ne plus développer, ne plus engager… Bref je ne vais pas refaire le monde et encore moins la connerie belge.
Dr X [connu de la Rédaction]
Merci à vous et bonne journée.
P.S.: Que savez-vous me dire sur cette loi et de son application? Va-t-elle être appliquée ? Quelles vont être les sanctions ? Remboursement des “P”, cela correspond à quoi en terme d’euros ?
Y a-t-il un recours en cours? Va-t-elle être annulée ? Que pouvons-nous faire ?
REPONSE :
Il est clair que les orthodontistes sont parmi les plus directement frappés par le système de points P élaboré par Michel DEVRIESE et sa Société de Médecine dentaire (SMD).
Ce système de points P vise ni plus ni moins à plafonner les revenus des dentistes, puis ceux des médecins : aujourd’hui la limite est fixée à 200 P de moyenne quotidienne, mais le plafond va progressivement descendre à 180 P puis 150 P.
Non seulement le prestataire — dentiste puis médecin — devra rembourser le montant excédant le plafond de points P, mais il se verra également infliger une amende administrative par le SECM de l’INAMI.
Tel qu’il est conçu, le système de Michel DEVRIESE pénalise aussi les praticiens qui, comme votre épouse, concentrent leur activité pour pouvoir — en compensation — s’accorder de plus longues vacances.
En effet, lorsque votre épouse est en vacances, elle n’atteste aucune prestation et ces jours de vacances ne comptent donc pas pour le calcul de la moyenne quotidienne : Michel DEVRIESE exige qu’une journée comporte un minimum de six prestations afin d’être incorporée dans la période sous revue.
DEVRIESE s’attaque donc non seulement aux honoraires des professionnels de la santé, mais également à leur style de vie : à ce titre, votre épouse est doublement pénalisée.
En réalité, Michel DEVRIESE n’a pas conçu son système de points P pour lutter contre votre épouse, qui en est seulement une « victime collatérale » : son véritable objectif est de frapper les dentistes européens.
Ces dentistes européens présentent en effet plus ou moins la même particularité que votre épouse, à savoir la concentration de leur travail en Belgique sur un nombre réduit de mois.
Michel DEVRIESE se montre évidemment fort discret à propos de son système de points P, mais nous disposons de documents internes à l’INAMI démontrant d’une manière irréfutable que c’est bien lui et sa SMD qui ont imposé ce mécanisme de plafonnement des honoraires contre l’avis des Chambres syndicales !
D’autre part, ce système des points P l’arrange bien, dans la mesure où il rabat vers lui et sa SMD des dizaines de praticiens effrayés par le nouveau système et qui cherchent — bien naïvement — sa « protection ».
Plusieurs organisations de dentistes ont saisi le Conseil d’Etat d’une demande d’annulation du système de points P, que Michel DEVRIESE est parvenu à traduire en arrêté royal.
L’Auditeur du Conseil d’Etat, M. Denis DELVAX, s’est déjà prononcé à deux reprises en faveur de l’annulation de cet arrêté royal.
Comme nous l’avons déjà signalé, le comble du comble est que les points P prennent des valeurs en euros différentes selon la nature de la prestation (consultation, obturation, radiographie, prothèse, orthodontie, etc) si bien qu’il est impossible de déterminer d’une manière univoque l’indu à rembourser et donc l’amende proportionnelle !
Manifestement, Monsieur DEVRIESE n’avait pas pensé à ce détail technique…
Dans sa rage de combattre les dentistes européens, il ne s’est sans doute pas non plus rendu compte que son aventure des points P mènerait à sa perte toute la médecine libérale : de sa propre initiative, l’Etat belge n’aurait en effet jamais osé imposer aux professionnels de la santé une limitation de leurs revenus.
Même le gouvernement LEFEVRE-SPAAK et sa fameuse loi LEBURTON — cause en 1964 de la plus longue grève médicale de l’histoire de la Belgique — étaient à mille lieues d’un tel projet.
Mais, dès lors qu’il émane d’une organisation représentative des praticiens — la Société de Médecine dentaire en l’occurrence — le système des points P est du pain bénit pour l’Etat belge, dont la priorité, surtout aujourd’hui, est de réduire les dépenses publiques.
Non seulement ce système fera tache d’huile et s’étendra aux médecins — sans doute le CARTEL du GBO soutiendrait-il un tel projet —, mais son caractère modulable en fait un instrument de contrôle idéal pour un gouvernement désireux de dompter le corps médical : il suffit d’abaisser progressivement le plafond de points P autorisés et/ou d’augmenter le nombre minimum de prestations quotidiennes…
Le meilleur conseil que nous puissions donner à votre épouse est de quitter la Société de Médecine dentaire et de s’affilier aux Chambres syndicales ou, si elle est bilingue, à la VBT.
Sinon, la décision proprement dite est dans les mains du Conseil d’Etat et celui-ci ne s’est pas encore prononcé ; sachez toutefois que neuf fois sur dix il suit l’avis de son Auditeur.
Vous trouverez plus d’informations sur notre site, notamment toutes les discussions confidentielles à l’INAMI, dont DEVRIESE croyait qu’elles ne seraient jamais révélées :
Ce que Michel DEVRIESE (SMD) n’ose pas vous dire : vos revenus seront désormais plafonnés (17 mai 2012)
Revenu plafonné pour le dentiste, sous peine de contrôle (Le Soir du 19.5.12 – 20 mai 2012)
AR du 17 janvier 2013 (MB 31.01.2013) relatif aux points en dentisterie (18 mars 2013)
Nomenclature de dentisterie avec les points P (18 mars 2013)
Faut-il avoir peur des points P ? (19 mars 2013)
Le système des points P devant le Conseil d’Etat (2 avril 2013)
Système des points P : réponse de l’Etat belge (1er juillet 2013)
Affaire des points P : l’intégralité du dossier administratif (17 juillet 2013)
L’INAMI et les quarante fraudeurs… (18 juillet 2013)
Affaire des points P : mémoire en réplique devant le Conseil d’Etat (29 août 2013)
“Système de points P” : Onkelinx à nouveau recalée par le Conseil d’Etat ! (21 mai 2014)
Système de points P : même l’Auditeur du Conseil d’Etat ne comprend pas comment fonctionne l’usine à gaz ! (2 juin 2014)