Recettes théoriques et recettes réelles…
A l’occasion du contrôle d’un dentiste de province, le fisc – section AFER – a adressé à l’INAMI une demande de renseignements portant sur « le nombre et la nature des prestations effectuées durant l’année 2008 ».
Une copie de la réponse a du reste été communiquée par l’INAMI au prestataire.
Cependant, il y a un gros problème : l’INAMI établit une liste des actes attestés en 2008 avec en regard le code NPS et calcule… l’honoraire INAMI théorique au lieu du montant réellement perçu* par le dentiste !
En effet, le dentiste est conventionné ANDM et pratique le tiers-payant pour tous ses patients, comme le veulent l’AR du 10.10.1986 (article 4bis, 2°) et son contrat CIN**.
Dans ce contexte, il abandonne souvent le ticket modérateur (TM) pour les assurés ordinaires (AO) adultes.
On sait qu’en dentisterie le taux de remboursement est de 75% de l’honoraire pour les AO et de 100% pour les BIM-OMNIO et les enfants (codes NPS 37xxxx).
Sachant que le total INAMI égale 158.000 euros, tandis que le total recettes prestataire égale 147.000 euros, quelle est la proportion de BIM-OMNIO, d’enfants et de patients payant plein tarif soignés par le dentiste en 2008 ?
Si l’on suppose que les patients BIM-OMNIO reçoivent peu ou prou les mêmes soins que les AO – et si l’on fait abstraction de la différence avec les enfants -, on peut écrire les équations*** suivantes:
75n + 100m = 147
100n + 100m = 158
où n est le nombre d’actes réalisés sur des AO et m celui sur des BIM-OMNIO, des enfants ou des patients payant plein tarif (le total d’actes tous patients confondus patients étant évidemment n + m).
On réduit à une inconnue m en déterminant la valeur relative de n :
n = (158 – 100m)/100 = 1,58 – m
d’où :
75(1,58 – m) + 100m = 147
118,5 – 75m + 100m = 147
25m = 147 – 118,5 = 28,5
Il en résulte que m vaut 28,5/25 soit 1,14 et n = (158 – 114)/100 = 0,44
La proportion de BIM-OMNIO, d’enfants et de patients payant plein tarif par rapport au total des patients est donc : m/(n + m), soit 1,14/1,58 ou 72,15%.
Autrement dit, le dentiste social n’a fait grâce du TM qu’à 27,85% de ses patients…
Cette proportion – assez classique en dentisterie sociale – explique que les recettes du dentiste ne s’établissent pas à 75% du total de l’honoraire INAMI (118.500 euros dans cet exemple), mais à une valeur intermédiaire entre le taux de remboursement et l’honoraire, soit 147.000 euros (93%).
Ces 147.000 euros de recettes se ventilent en : 114.000 euros générés par les prestations réalisées sur les BIM-OMNIO, les enfants et les patients payant plein tarif, et 33.000 euros générés par les prestations réalisées sur les patients auxquels le dentiste a fait grâce du TM.
Le fisc commet pour sa part une erreur juridique en écrivant dans l’avis de rectification de la déclaration que l’honoraire INAMI serait « le montant minimal à percevoir » : c’est tout à fait faux**** !
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* Le montant réellement perçu ne peut certes être inférieur au taux de remboursement des actes, mais il peut se situer entre cette dernière valeur et celle de l’honoraire, selon que le TM est abandonné, perçu en partie ou en totalité.
** Art. 4bis.<Inséré par AR 1992-08-19/51, art. 1, 005; En vigueur : 01-10-1992> L’application du régime du tiers payant pour le paiement de l’intervention de l’assurance dans les frais des prestations de santé autres que celles visées aux articles 5 et 6, effectuées par des médecins et des praticiens de l’art dentaire peut se faire selon les modalités définies par le présent article.
§ 1er. L’octroi du régime du tiers payant est subordonné dans le chef du prestataire de soins aux conditions suivantes :
1° (Au moment de sa demande, le prestataire de soins ne peut avoir notifié un refus d’adhésion au dernier accord prévu au Titre III, (Chapitre V de la loi coordonnée susmentionnée). Sans préjudice des dispositions de la phrase précédente, le prestataire qui adhère à un accord dans des conditions de temps et de lieu peut appliquer le régime du tiers payant pour les prestations effectuées dans le cadre de son activité engagée. <AR 2001-05-08/30, art. 3, 013; En vigueur : 17-06-2001>
Toutefois, le régime du tiers payant peut être appliqué par le prestataire de soins qui a refusé d’adhérer à l’accord pour les prestations fournies dans le cadre d’un service de garde organisé.) <AR 1993-01-12/30, art. 1, 006; En vigueur : 20-01-1993>
2° Le prestataire de soins doit appliquer le régime du tiers payant pour tous les bénéficiaires et pour toutes les prestations pour lesquelles ce régime est autorisé et qui sont effectuées dans le même centre d’activité.
*** Si l’on veut se dispenser d’équations, on peut raisonner comme suit : les 158.000 euros d’honoraires calculés par l’INAMI correspondent – au taux de remboursement de 75% – à 118.500 euros ; comme le chiffre d’affaires (CA) total du dentiste est de 147.000 euros, il faut y ajouter 147.000 – 118.500 = 28.500 euros de CA généré par les 25% de remboursement complémentaire pour les BIM-OMNIO et les enfants (codes NPS 37xxx) ou par les TM acquittés par les AO. Au sein des 147.000 euros de CA, les BIM-OMNIO, les enfants et les patients ayant acquitté le TM « pèsent » donc quatre fois 28.500 soit 114.000 euros. Et 114.000/158.000 = 72,15%.
**** L’honoraire INAMI est peut-être le « montant minimal » pour un praticien non conventionné, mais il constitue au contraire le montant « maximal » pour un conventionné.