Pour la cour de Cassation, une société peut déduire des frais sans lien avec ses statuts
(Belga) Dans cinq arrêts récents, la Cour de cassation a considérablement élargi la notion de frais professionnels déductibles pour les entreprises. D’après cette jurisprudence, une société constituée par un médecin peut par exemple déduire les coûts d’un appartement à la Côte ou d’une piscine, expliquaient jeudi dernier De Morgen et Het Laatste Nieuws. « La Cour n’exige plus que la dépense soit liée à l’objet social de la société », analyse mardi l’avocat spécialisé Thierry Litannie.
De longue date, l’administration fiscale mène une « offensive » contre les sociétés qui comptent comme charges professionnelles le coût des biens qu’elles mettent à disposition de leurs dirigeants, rapporte Thierry Litannie. Pour l’administration, et jusqu’il y a peu la Cour de cassation, une société peut déduire uniquement les frais en lien avec ses statuts. Mais selon l’avocat auteur d’un ouvrage sur le sujet (« Déduction des charges professionnelles – 2015 », éd. Anthemis), la Cour a changé son fusil d’épaule l’an dernier. Encouragée par de nombreux fiscalistes, elle accepte désormais de considérer les biens mis à disposition des dirigeants d’une entreprise comme une rémunération en nature. Or, toute rémunération est déductible au titre de frais professionnel. Un médecin peut donc parfaitement vendre l’usufruit de sa villa à sa société et, tandis qu’il en garde la nue propriété, déduire le coût de l’usufruit via sa société. « Le seul critère, c’est le caractère professionnel de la dépense. Quand une société expose des frais en vue de rémunérer ses dirigeants, que des impôts sont payés à cet effet, il n’y a aucune raison de ne pas les déduire comme frais professionnels », confirme Thierry Litannie. Peu importe que les frais en question se rapportent à une maison de vacances, une voiture de luxe ou une piscine. Pour la Cour de cassation, le fisc n’a pas à s’immiscer dans la manière dont une société rémunère ses dirigeants. Toutefois, rien ne dit que l’administration va s’aligner sur cette jurisprudence, relève Me Litannie. Quantité de litiges sont en cours. Mais le fisc ne changera probablement pas d’approche sans décision politique. Johan Van Overtveldt, le ministre des Finances, a indiqué qu’il étudiait actuellement la portée des arrêts de la Cour de cassation.