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Arrêt C-421/12 de la Cour européenne de Justice (10 juillet 2014)

10 juillet, 2014 par admin

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ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

10 juillet 2014 (*)

«Manquement d’État – Protection des consommateurs – Pratiques commerciales déloyales – Directive 2005/29/CE – Harmonisation complète – Exclusion des professions libérales, des dentistes et des kinésithérapeutes – Modalités d’annonce de réductions de prix – Limitation ou interdiction de certaines formes d’activités de vente ambulantes»

Dans l’affaire C‑421/12,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 13 septembre 2012,

Commission européenne, représentée par M. M. van Beek et par Mme M. Owsiany-Hornung, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Royaume de Belgique, représenté par MM. T. Materne et J.‑C. Halleux, en qualité d’agents, assistés de Me É. Balate, avocat,

partie défenderesse,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. M. Ilešič, président de chambre, MM. C. G. Fernlund, A. Ó Caoimh, Mme C. Toader (rapporteur) et M. E. Jarašiūnas, juges,

avocat général: M. P. Cruz Villalón,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite et ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 26 novembre 2013,

rend le présent

Arrêt

1 Par son recours, la Commission européenne demande à la Cour de constater que:

–        en excluant les titulaires d’une profession libérale ainsi que les dentistes et les kinésithérapeutes du champ d’application de la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce et sur l’information et la protection du consommateur (Moniteur belge du 29 août 1991, p. 18712), telle que modifiée par la loi du 5 juin 2007 (Moniteur belge du 21 juin 2007, p. 34272, ci-après la «loi du 14 juillet 1991»), transposant la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) n° 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil («directive sur les pratiques commerciales déloyales») (JO L 149, p. 22), le Royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 3 de cette directive, lu en combinaison avec l’article 2, sous b) et d), de celle-ci;

–        en maintenant en vigueur les articles 20, 21 et 29 de la loi du 6 avril 2010 relative aux pratiques du marché et à la protection du consommateur (Moniteur belge du 12 avril 2010, p. 20803, ci-après la «loi du 6 avril 2010»), le Royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4 de la directive 2005/29,

–        en maintenant en vigueur l’article 4, paragraphe 3, de la loi du 25 juin 1993 sur l’exercice et l’organisation des activités ambulantes et foraines (Moniteur belge du 30 septembre 1993, p. 21526), telle que modifiée par la loi du 4 juillet 2005 (Moniteur belge du 25 août 2005, p. 36965, ci-après la «loi du 25 juin 1993»), ainsi que l’article 5, paragraphe 1, de l’arrêté royal du 24 septembre 2006 relatif à l’exercice et à l’organisation des activités ambulantes (Moniteur belge du 29 septembre 2006, p. 50488, ci-après l’«arrêté royal du 24 septembre 2006»), le Royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4 de la directive 2005/29.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 2005/29

2 Les considérants 6, 15 et 17 de la directive 2005/29 se lisent comme suit:

«(6)      La présente directive a […] pour objet de rapprocher les législations des États membres relatives aux pratiques commerciales déloyales, y compris la publicité déloyale, portant atteinte directement aux intérêts économiques des consommateurs et, par conséquent, indirectement aux intérêts économiques des concurrents légitimes. […] Elle ne couvre ni n’affecte les législations nationales relatives aux pratiques commerciales déloyales qui portent atteinte uniquement aux intérêts économiques de concurrents ou qui concernent une transaction entre professionnels; pour tenir pleinement compte du principe de subsidiarité, les États membres conserveront, s’ils le souhaitent, la faculté de réglementer les pratiques visées, conformément à la législation communautaire. […]

[…]

(15)      Lorsque la législation communautaire fixe des prescriptions en matière d’information applicables à la publicité, à la communication commerciale et au marketing, les informations en question sont réputées substantielles au sens de la présente directive. Les États membres auront la faculté de maintenir ou d’instaurer des prescriptions en matière d’information liées au droit des contrats ou ayant des implications en matière de droit des contrats lorsque cette possibilité est prévue par les clauses minimales comprises dans les instruments de droit communautaire existants. On trouvera à l’annexe II une liste non exhaustive de ce type de prescriptions en matière d’information telles qu’elles figurent dans l’acquis [communautaire applicable aux pratiques commerciales portant préjudice aux intérêts économiques des consommateurs]. Étant donné que la présente directive vise à procéder à une harmonisation totale, seules les informations exigées en vertu de la législation communautaire sont considérées comme étant substantielles aux fins de son article 7, paragraphe 5. Si les États membres ont introduit des prescriptions en matière d’information au-delà ou en sus de ce qui est spécifié par la législation communautaire, en vertu des clauses minimales, le non-respect de ces prescriptions ne sera pas considéré comme une omission trompeuse au sens de la présente directive. Par contre, les États membres auront la faculté, lorsque les clauses minimales comprises dans la législation communautaire le permettent, de maintenir ou d’instaurer des dispositions plus strictes, conformes à la législation communautaire, pour assurer un niveau plus élevé de protection des droits contractuels individuels des consommateurs.

[…]

(17)      Afin d’apporter une plus grande sécurité juridique, il est souhaitable d’identifier les pratiques commerciales qui sont, en toutes circonstances, déloyales. L’annexe I contient donc la liste complète de toutes ces pratiques. Il s’agit des seules pratiques commerciales qui peuvent être considérées comme déloyales sans une évaluation au cas par cas au titre des dispositions des articles 5 à 9. Cette liste ne peut être modifiée que par une révision de la directive.»

3 Ainsi qu’il ressort de son article 1er, l’objectif de la directive 2005/29 «est de contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur et d’assurer un niveau élevé de protection des consommateurs en rapprochant les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives aux pratiques commerciales déloyales qui portent atteinte aux intérêts économiques des consommateurs».

4 En application de l’article 2, sous b), de cette directive, on entend par «professionnel», «toute personne physique ou morale qui, pour les pratiques commerciales relevant de la présente directive, agit à des fins qui entrent dans le cadre de son activité, commerciale, industrielle, artisanale ou libérale, et toute personne agissant au nom ou pour le compte d’un professionnel». L’article 2, sous d), de ladite directive définit pour sa part les «pratiques commerciales des entreprises vis-à-vis des consommateurs» comme étant «toute action, omission, conduite, démarche ou communication commerciale, y compris la publicité et le marketing, de la part d’un professionnel, en relation directe avec la promotion, la vente ou la fourniture d’un produit aux consommateurs».

5 Sous l’intitulé «Champ d’application», l’article 3 de cette même directive dispose:

«1.      La présente directive s’applique aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs, telles que définies à l’article 5, avant, pendant et après une transaction commerciale portant sur un produit.

2.      La présente directive s’applique sans préjudice du droit des contrats, ni, en particulier, des règles relatives à la validité, à la formation ou aux effets des contrats.

[…]

5.      Pendant une période de six ans à compter du 12 juin 2007, les États membres ont la faculté de continuer à appliquer des dispositions nationales dont la présente directive opère le rapprochement, plus restrictives ou plus rigoureuses que la présente directive et qui mettent en œuvre des directives incluant des clauses d’harmonisation minimale. Ces mesures doivent être essentielles pour garantir que les consommateurs soient protégés de manière adéquate contre les pratiques commerciales déloyales et doivent être proportionnées à cet objectif à atteindre. La révision visée à l’article 18 peut, s’il y a lieu, comprendre une proposition visant à proroger cette dérogation pour une durée limitée.

6.      Les États membres notifient sans délai à la Commission toute disposition nationale appliquée au titre du paragraphe 5.

[…]»

6 Aux termes de l’article 4 de la directive 2005/29:

«Les États membres ne restreignent ni la libre prestation de services, ni la libre circulation des marchandises pour des raisons relevant du domaine dans lequel la présente directive vise au rapprochement des dispositions en vigueur.»

7 Sous l’intitulé «Interdiction des pratiques commerciales déloyales», l’article 5 de cette directive prévoit:

«1.      Les pratiques commerciales déloyales sont interdites.

2.      Une pratique commerciale est déloyale si:

a)      elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle,

et

b)      elle altère ou est susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique, par rapport au produit, du consommateur moyen qu’elle touche ou auquel elle s’adresse, ou du membre moyen du groupe lorsqu’une pratique commerciale est ciblée vers un groupe particulier de consommateurs.

[…]

4.      En particulier, sont déloyales les pratiques commerciales qui sont:

a)      trompeuses au sens des articles 6 et 7,

ou

b)      agressives ou sens des articles 8 et 9.

5.      L’annexe I contient la liste des pratiques commerciales réputées déloyales en toutes circonstances. Cette liste unique s’applique dans tous les États membres […]»

La directive 85/577/CEE

8 En vertu de l’article 1er, paragraphe 1, de la directive 85/577/CEE du Conseil, du 20 décembre 1985, concernant la protection des consommateurs dans le cas de contrats négociés en dehors des établissements commerciaux (JO L 372, p. 31), celle-ci s’applique aux contrats conclus entre un commerçant fournissant des biens ou des services et un consommateur soit pendant une excursion organisée par le commerçant en dehors de ses établissements commerciaux, soit pendant une visite du commerçant, notamment chez le consommateur, lorsque la visite n’a pas lieu à la demande expresse de ce consommateur.

9 Conformément à l’article 5, paragraphe 1, de cette directive, dans le cadre de contrats relevant de son champ d’application, le consommateur a le droit de renoncer aux effets de son engagement en adressant une notification dans un délai d’au moins sept jours à compter du moment où le professionnel l’a informé de son droit de résilier le contrat.

10 En application de l’article 8 de ladite directive, celle-ci «ne fait pas obstacle à ce que les États membres adoptent ou maintiennent des dispositions encore plus favorables en matière de protection des consommateurs dans le domaine couvert par elle».

La directive 98/6/CE

11 Ainsi qu’il résulte de l’article 1er de la directive 98/6/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 1998, relative à la protection des consommateurs en matière d’indication des prix des produits offerts aux consommateurs (JO L 80, p. 27), celle-ci a pour objet de prévoir l’indication du prix de vente et du prix à l’unité de mesure des produits offerts par des professionnels aux consommateurs, afin d’améliorer l’information des consommateurs et de faciliter la comparaison des prix.

12 Conformément à l’article 10 de cette directive, celle-ci «n’empêche pas les États membres d’adopter ou de maintenir des dispositions plus favorables en ce qui concerne l’information des consommateurs et la comparaison des prix, sans préjudice de leurs obligations au titre du traité».

La directive 2011/83/UE

13 Aux termes du considérant 9 de la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs, modifiant la directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil (JO L 304, p. 64), cette directive établit notamment des règles relatives aux informations à fournir pour les contrats à distance, les contrats hors établissement et les contrats autres que les contrats à distance et hors établissement et régit également le droit de rétractation pour les contrats à distance et hors établissement.

14 En vertu de l’article 28 de ladite directive, les États membres adoptent et publient au plus tard le 13 décembre 2013 les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à celle-ci et appliquent ces mesures à partir du 13 juin 2014.

15 L’article 31 de cette même directive abroge la directive 85/577 à compter du 13 juin 2014.

Le droit belge

16 Aux termes des modifications apportées par la loi du 5 juin 2007, la loi du 14 juillet 1991 a transposé en droit interne la directive 2005/29. Cette loi a été abrogée à dater du 12 mai 2010 par la loi du 6 avril 2010.

17 Ces deux législations successives excluent de leur champ d’application les titulaires d’une profession libérale ainsi que les dentistes et les kinésithérapeutes. Ainsi, les articles 2, 1° et 2°, ainsi que 3, paragraphe 2, de la loi du 6 avril 2010 étaient rédigés dans les termes suivants:

«Art. 2.      Pour l’application de la présente loi, on entend par:

1°      entreprise: toute personne physique ou personne morale poursuivant de manière durable un but économique, y compris ses associations;

2°      titulaire d’une profession libérale: toute entreprise qui n’est pas commerçante au sens de l’article 1er du Code de commerce et qui est soumise à un organe disciplinaire créé par la loi;

[…]

Art. 3.      […]

§ 2.      La présente loi ne s’applique pas aux titulaires d’une profession libérale, aux dentistes et aux kinésithérapeutes.»

18 Par ses arrêts n° 55/2011 du 6 avril 2011 (Moniteur belge du 8 juin 2011, p. 33389) et n° 192/2011 du 15 décembre 2011(Moniteur belge du 7 mars 2012, p. 14196), la Cour constitutionnelle a déclaré inconstitutionnels les articles 2, 1° et 2°, ainsi que 3, paragraphe 2, de la loi du 6 avril 2010, dans la mesure où ces dispositions avaient pour effet d’exclure les titulaires d’une profession libérale ainsi que les dentistes et les kinésithérapeutes du champ d’application de cette loi.

19 L’article 4 de la loi du 2 août 2002 relative à la publicité trompeuse et à la publicité comparative, aux clauses abusives et aux contrats à distance en ce qui concerne les professions libérales (Moniteur belge du 20 novembre 2002, p. 51704, ci-après la «loi du 2 août 2002») contient une définition de la publicité trompeuse et prévoit son interdiction en ce qui concerne les professions libérales.

20 Les articles 43, paragraphe 2, et 51, paragraphe 3, de la loi du 14 juillet 1991 prévoyaient, en substance, que les commerçants ne pouvaient pas annoncer une réduction de prix, notamment dans le cadre de soldes, si le prix du produit offert à la vente ne subissait pas une réelle réduction par rapport au prix habituellement pratiqué pendant une période continue d’un mois précédant immédiatement la date à partir de laquelle le prix réduit était applicable.

21 En vertu des articles 20, 21 et 29 de la loi du 6 avril 2010, les produits ne peuvent être considérés comme soldés que si le prix demandé est inférieur au prix de référence, qui est le prix le plus bas que l’entreprise a pratiqué pour ce bien, au cours du mois concerné, dans ce point de vente ou selon cette technique de vente.

22 L’article 4 de la loi du 25 juin 1993 prévoit que l’exercice des activités ambulantes est autorisé au domicile du consommateur pour autant que ces activités concernent des produits ou des services d’une valeur totale de moins de 250 euros par consommateur. Par ailleurs, l’article 5 de l’arrêté royal du 24 septembre 2006, pris en exécution de la loi du 25 juin 1993, prévoit que certains produits, tels que les médicaments, les appareils médicaux et orthopédiques, les verres correcteurs et leurs montures, les métaux précieux, les pierres précieuses, les perles fines et de culture ainsi que les armes et munitions, ne peuvent pas faire l’objet d’une activité ambulante.

La procédure précontentieuse

23 Le 2 février 2009, la Commission a adressé au Royaume de Belgique une lettre de mise en demeure portant sur onze griefs relatifs à divers manquements à la directive 2005/29. Dans ses lettres en réponse des 3 et 24 juin 2009, cet État membre a annoncé des modifications législatives visant à résoudre plusieurs problèmes soulevés par la Commission. C’est dans ce contexte que la loi du 6 avril 2010 est entrée en vigueur le 12 mai 2010.

24 Après avoir analysé cette loi, la Commission a constaté que celle-ci ne palliait pas à quatre griefs soulevés dans la mise en demeure. Dès lors, le 15 mars 2011, elle a envoyé un avis motivé au Royaume de Belgique portant sur ceux-ci. Cet État membre a répondu à cet avis le 11 mai 2011.

25 N’étant pas satisfaite de la réponse apportée par le Royaume de Belgique à l’égard de trois des griefs qu’elle soulevait dans son avis motivé, la Commission a décidé d’introduire le présent recours.

Sur le recours

Sur le premier grief

26 Par ce grief, la Commission fait valoir que, en excluant les professions libérales, les dentistes et les kinésithérapeutes du champ d’application de la loi du 6 avril 2010, le Royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2005/29, lu en combinaison avec l’article 2, sous b) et d), de celle-ci.

Sur la recevabilité du premier grief

–       Argumentation des parties

27 Le Royaume de Belgique relève que, dans le cadre de ce grief, la Commission fait abstraction de l’existence de la loi du 2 août 2002. Cette législation, toujours en vigueur, définirait ce que constitue une publicité trompeuse commise par une personne exerçant une profession libérale et organiserait également des mesures spécifiques de contrôle juridictionnel. Or, la Commission, dans sa requête, n’aurait précisé ni quelles dispositions relatives à la protection des consommateurs prévues par la directive 2005/29 n’ont pas été transposées en droit belge ni en quoi la loi du 2 août 2002 est constitutive d’un manquement à cette directive.

28 Le Royaume de Belgique note également que la Commission ne conteste pas que l’article 4 de la loi du 2 août 2002 interdit la publicité trompeuse aux professions libérales et met en œuvre, en cela, l’article 2, sous d), de la directive 2005/29. Ainsi, cette disposition de droit national assurerait au moins une transposition partielle des dispositions de ladite directive. Dans la mesure où cette institution n’aurait pas pris en compte l’existence de la loi du 2 août 2002 dans la formulation de sa requête, le premier grief serait irrecevable.

29 La Commission, dans sa réplique, relève que, même si la loi du 2 août 2002 interdit aux titulaires de professions libérales de se livrer à des actes de publicité trompeuse, cette loi, invoquée pour la première fois par le Royaume de Belgique dans son mémoire en défense, a en réalité pour objet de transposer en droit interne non pas la directive 2005/29, mais, pour l’essentiel, la directive 84/450/CEE du Conseil, du 10 septembre 1984, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de publicité trompeuse (JO L 250, p. 17).

–       Appréciation de la Cour

30 En vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 120, sous c), du règlement de procédure de celle-ci, il incombe à la Commission, dans toute requête déposée au titre de l’article 258 TFUE, d’indiquer les griefs précis sur lesquels la Cour est appelée à se prononcer ainsi que, de manière à tout le moins sommaire, les éléments de droit et de fait sur lesquels ces griefs sont fondés. Il s’ensuit que le recours de la Commission doit contenir un exposé cohérent et détaillé des raisons l’ayant amenée à la conviction que l’État membre intéressé a manqué à l’une des obligations qui lui incombent en vertu des traités (voir, notamment, arrêt Commission/Belgique, C‑150/11, EU:C:2012:539, points 26 et 27 ainsi que jurisprudence citée).

31 En l’espèce, la requête déposée par la Commission, aux termes de laquelle celle-ci reproche en substance au Royaume de Belgique, en violation des articles 3, paragraphe 1, ainsi que 2, sous b) et d), de la directive 2005/29, d’avoir exclu les professions libérales, les dentistes et les kinésithérapeutes du champ d’application de la législation nationale transposant cette directive, à savoir la loi du 6 avril 2010, contient un exposé clair de ce grief et des éléments de fait et de droit sur lesquels il est fondé.

32 Certes, il est constant que, dans cet acte de procédure, la Commission n’a pas cherché à démontrer en quoi la loi du 2 août 2002, en vigueur lors de l’adoption de la directive 2005/29, qui interdit aux professions libérales la publicité trompeuse, n’était pas conforme aux dispositions de cette directive.

33 Toutefois, il convient de rappeler que, dans le cadre d’une procédure en manquement en vertu de l’article 258 TFUE, il incombe également à l’État membre concerné, en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE, de lui faciliter l’accomplissement de sa mission consistant, notamment, selon l’article 17, paragraphe 1, TUE, à veiller à l’application des dispositions du traité FUE ainsi que des dispositions prises par les institutions en vertu de celui-ci (voir, en ce sens, arrêt Commission/Italie, C‑456/03, EU:C:2005:388, point 26 et jurisprudence citée).

34 Une application du principe de coopération loyale est celle prévue à l’article 19 de la directive 2005/29 qui, à l’instar d’autres directives, impose aux États membres une obligation d’information claire et précise. Ainsi que la Cour l’a déjà jugé, en l’absence d’une telle information, la Commission n’est pas en mesure de vérifier si l’État membre a réellement et complètement mis en application la directive. Le manquement d’un État membre à cette obligation, que ce soit par une absence totale d’information ou par une information insuffisamment claire et précise, peut justifier, à lui seul, l’ouverture de la procédure de l’article 258 TFUE visant à la constatation de ce manquement (arrêt Commission/Italie, EU:C:2005:388, point 27 et jurisprudence citée).

35 Or, en l’espèce, il n’est pas contesté que le Royaume de Belgique invoque pour la première fois au stade de son mémoire en défense devant la Cour l’argument selon lequel la loi du 2 août 2002 constitue une transposition de la directive 2005/29. Dans sa réponse à l’avis motivé, cet État membre s’est en effet borné, pour toute défense, à se référer à l’arrêt n° 55/2011 de la Cour constitutionnelle, rendu le 6 avril 2011, qui a déclaré inconstitutionnelle l’exclusion des professions libérales de la loi du 6 avril 2010. Ledit État membre a en outre indiqué qu’une modification législative interviendrait «dans les prochaines semaines» en vue de se conformer au droit de l’Union.

36 Dans ces conditions, le Royaume de Belgique ne saurait reprocher à la Commission de s’être limitée, dans sa requête, à exposer en quoi la loi du 6 avril 2011 ne constitue pas une transposition correcte de la directive 2005/29, sans chercher à expliquer dans quelle mesure la loi du 2 août 2002 n’exerçait aucune incidence à cet égard. En effet, le manque de précision de la requête qui est allégué résulte du propre comportement des autorités de cet État membre au cours de la procédure précontentieuse.

37 Il résulte de ce qui précède que le premier grief de la Commission à l’appui de son recours doit être déclaré recevable.

Sur le fond du premier grief

–       Argumentation des parties

38 S’appuyant sur le libellé des articles 2, sous b), et 3, paragraphe 1, de la directive 2005/29, lequel vise expressément les activités libérales, la Commission fait valoir que cette directive s’applique aux pratiques commerciales de tous les professionnels, quels que soient leur statut juridique ou leur secteur d’activité. Par conséquent, l’exclusion expresse des professions libérales, des dentistes et des kinésithérapeutes du champ d’application de la loi du 6 avril 2010 violerait l’article 3 de la directive 2005/29, lu en combinaison avec l’article 2, sous b), de celle-ci.

39 Dans le cadre de la phase précontentieuse, le Royaume de Belgique avait soutenu que la Cour constitutionnelle, dans son arrêt n° 55/2011 du 6 avril 2011, avait précisément déclaré contraires à la Constitution les dispositions de la loi du 6 avril 2010 qui excluaient ces professions de son champ d’application et qu’une telle déclaration d’inconstitutionnalité ouvrait la voie à l’introduction d’un recours en annulation contre cette loi dans un délai de six mois, lequel pourrait conduire à une annulation rétroactive des dispositions litigieuses de ladite loi. À cet égard, la Commission relève, en premier lieu, que, par cette argumentation, le Royaume de Belgique reconnaît le bien-fondé du manquement qui lui est reproché, y compris à la date d’expiration du délai imparti dans l’avis motivé. En second lieu, cette institution estime que l’hypothétique annulation rétroactive à laquelle pourrait procéder la Cour constitutionnelle ne saurait remédier au manquement reproché et s’opposerait à la jurisprudence de la Cour portant sur la nécessité de clarté et de sécurité juridique lors de la transposition des règles du droit de l’Union relatives à la protection des consommateurs, dès lors qu’une telle régularisation n’est pas de nature à éliminer l’infraction qui subsistait à l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé.

40 Sur le fond, le Royaume de Belgique ne conteste pas la réalité de l’exclusion de certaines professions du champ d’application de la loi du 6 avril 2010. Cependant, cet État membre rappelle que la Cour constitutionnelle a invalidé cette exclusion par ses arrêts n° 55/2011 du 6 avril 2011 et n° 192/2011 du 15 décembre 2011. Il soutient que l’appréciation, par la Cour, de la transposition en cause doit être opérée en tenant compte de ces arrêts, dans la mesure où ceux-ci ont eu pour effet de rendre inapplicables, avant l’expiration du délai imparti dans l’avis motivé, par les cours et les tribunaux belges, les dispositions concernées de la loi du 6 avril 2010, de sorte que l’exclusion qu’elles contenaient a été privée d’effet dès le prononcé de ces arrêts.

41 Dans son mémoire en défense, le Royaume de Belgique précise également que, à la date du dépôt de celui-ci, un recours en annulation a été introduit devant la Cour constitutionnelle qui, s’il devait aboutir, aurait pour effet d’annuler rétroactivement les articles 2, 2°, et 3, paragraphe 2, de la loi du 6 avril 2010. Il en résulterait que ces dispositions de droit national seraient réputées n’avoir jamais fait partie de l’ordre juridique belge, de sorte que le manquement reproché au Royaume de Belgique pourrait ne jamais avoir existé.

–       Appréciation de la Cour

42 Il y a lieu de relever que, tout en reconnaissant le bien-fondé du premier grief, le Royaume de Belgique a fait valoir que, en réalité, le manquement allégué par la Commission aurait été «corrigé» par l’effet des arrêts n° 55/2011 du 6 avril 2011 et n° 192/2011 du 15 décembre 2011 de la Cour constitutionnelle déclarant inconstitutionnels les articles 2, 2°, et 3, paragraphe 2, de la loi du 6 avril 2010.

43 Toutefois, il convient de rappeler qu’il découle d’une jurisprudence constante de la Cour qu’un État membre ne saurait exciper de dispositions, de pratiques ou de situations de son ordre juridique interne pour justifier le non-respect des obligations résultant des normes du droit de l’Union (voir, notamment, arrêts Commission/Luxembourg, C‑450/00, EU:C:2001:519, point 8, et Commission/Luxembourg, C‑375/04, EU:C:2005:264, point 11).

44 Par ailleurs, l’existence de voies de droit ouvertes auprès des juridictions nationales ne saurait préjudicier à l’exercice du recours visé à l’article 258 TFUE les deux actions poursuivant des buts et ayant des effets différents (voir arrêt Commission/Italie, C‑87/02, EU:C:2004:363, point 39 et jurisprudence citée).

45 Il résulte également d’une jurisprudence constante de la Cour que l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé (voir arrêts Commission/Espagne, C‑168/03, EU:C:2004:525, point 24; Commission/Allemagne, C‑152/05, EU:C:2008:17, point 15, et Commission/Luxembourg, C‑282/08, EU:C:2009:55, point 10). Les changements intervenus par la suite ne peuvent être pris en compte par la Cour (voir, notamment, arrêts Commission/Irlande, C‑482/03, EU:C:2004:733, point 11, et Commission/Suède, C‑185/09, EU:C:2010:59, point 9).

46 En outre, la Cour a déjà jugé qu’une jurisprudence nationale, à la supposer établie, interprétant des dispositions de droit interne dans un sens estimé conforme aux exigences d’une directive ne saurait présenter la clarté et la précision requises pour satisfaire à l’exigence de sécurité juridique, tel étant particulièrement le cas dans le domaine de la protection des consommateurs (voir arrêt Commission/Pays-Bas, C‑144/99, EU:C:2001:257, point 21).

47 Il s’ensuit que les circonstances invoquées par le Royaume de Belgique sont sans incidence sur l’existence du manquement, par ailleurs non contesté par cet État membre.

48 Au vu de ce qui précède, il y a lieu de considérer le premier grief invoqué par la Commission comme étant fondé.

Sur le deuxième grief

Argumentation des parties

49 La Commission constate que les articles 20, 21 et 29 de la loi du 6 avril 2010 prévoient que toute annonce de réduction de prix doit faire référence à un prix défini par la loi, en l’occurrence, le prix le plus bas appliqué durant le mois précédant le premier jour de l’annonce en question. En outre, ces dispositions interdiraient, d’une part, l’annonce de réduction de prix au-delà d’un mois et, d’autre part, en principe, que de telles annonces soient faites pour une durée inférieure à une journée.

50 Or, dans la mesure où la directive 2005/29 a procédé à une harmonisation complète de la réglementation en matière de pratiques commerciales déloyales, l’article 4 de celle-ci s’opposerait à l’existence de dispositions nationales plus restrictives, telles que celles visées au point précédent.

51 En effet, l’annexe I de la directive 2005/29 établirait une liste exhaustive de 31 pratiques commerciales réputées déloyales en toutes circonstances, parmi lesquelles ne figurent pas les pratiques visées par la législation belge sur l’annonce des réductions de prix. Ainsi, de telles pratiques devraient faire l’objet d’un examen au cas par cas pour déterminer si elles sont à considérer ou non comme déloyales. Or, la réglementation belge aurait pour effet d’interdire toute réduction des prix qui ne serait pas conforme aux critères posés par cette loi, alors même que de telles pratiques, à l’issue d’un examen au cas par cas, pourraient ne pas être considérées comme trompeuses ou déloyales au sens de cette directive.

52 Le Royaume de Belgique souligne, d’une part, que la directive 2005/29, bien que procédant à une harmonisation complète, ne contient pas des règles harmonisées permettant d’établir la réalité économique des annonces de réductions de prix. D’autre part, la directive 98/6 n’aurait pas été modifiée par la directive 2005/29. Or, l’article 10 de la directive 98/6 habiliterait les États membres à adopter ou à maintenir des dispositions plus favorables concernant l’information des consommateurs ainsi que la comparaison des prix.

53 En outre, la Cour, dans son arrêt GB-INNO-BM (C‑362/88, EU:C:1990:102), aurait érigé en principe le droit à l’information du consommateur, de sorte que, en réalité, les articles 20, 21 et 29 de la loi du 6 avril 2010 devraient être analysés à l’aune du seul article 28 TFUE.

Appréciation de la Cour

54 À titre liminaire, il y a lieu de préciser que les articles 20, 21 et 29 de la loi du 6 avril 2010 portent sur des annonces de réduction de prix, lesquelles constituent des pratiques commerciales, au sens de l’article 2, sous d), de la directive 2005/29, et relèvent, dès lors, du champ d’application de cette directive (voir, en ce sens, ordonnance INNO, C‑126/11, EU:C:2011:851, point 30 et jurisprudence citée).

55 La Cour a déjà jugé que la directive 2005/29 procède à une harmonisation complète au niveau de l’Union des règles relatives aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs. Dès lors, comme le prévoit expressément l’article 4 de celle-ci, les États membres ne peuvent pas adopter des mesures plus restrictives que celles définies par ladite directive, même aux fins d’assurer un degré plus élevé de protection des consommateurs (voir arrêts Plus Warenhandelsgesellschaft, C‑304/08, EU:C:2010:12, point 41, et Mediaprint Zeitungs- und Zeitschriftenverlag, C‑540/08, EU:C:2010:660, point 37).

56 En outre, la directive 2005/29 établit, à son annexe I, une liste exhaustive de 31 pratiques commerciales qui, conformément à l’article 5, paragraphe 5, de cette directive, sont réputées déloyales «en toutes circonstances». Par conséquent, ainsi que le précise expressément le considérant 17 de ladite directive, seules ces pratiques commerciales sont susceptibles d’être considérées comme déloyales sans faire l’objet d’une évaluation au cas par cas au titre des dispositions des articles 5 à 9 de la directive 2005/29 (voir arrêt Plus Warenhandelsgesellschaft, EU:C:2010:12, point 45).

57 Le Royaume de Belgique soutient, pour l’essentiel, que les mesures plus restrictives, telles que prévues aux articles 20, 21 et 29 de la loi du 6 avril 2010, restent permises en vertu de la clause d’harmonisation minimale prévue à l’article 10 de la directive 98/6, selon laquelle les États membres sont habilités à adopter ou à maintenir des dispositions plus favorables concernant l’information des consommateurs ainsi que la comparaison des prix.

58 À cet égard, il est constant que, conformément à l’article 3, paragraphe 5, de la directive 2005/29, pendant une période de six ans à compter du 12 juin 2007, les États membres avaient la faculté de continuer à appliquer des dispositions nationales dont cette directive opère le rapprochement, plus restrictives ou plus rigoureuses que ladite directive et qui mettent en œuvre des directives incluant des clauses d’harmonisation minimale.

59 Toutefois, il convient d’observer que, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé aux points 58 et suivants de ses conclusions, l’objet de la directive 98/6 est la protection des consommateurs non pas en matière d’indication des prix, en général ou quant à la réalité économique des annonces de réduction de prix, mais en matière d’indication des prix des produits par référence à différents types d’unités de mesure.

60 Il ne saurait dès lors être valablement soutenu que l’article 10 de la directive 98/6 puisse justifier le maintien de dispositions nationales plus restrictives portant sur la réalité économique des annonces de réduction de prix, telles que les articles 20, 21 et 29 de la loi du 6 avril 2010, dans la mesure où de telles dispositions n’entrent pas dans le champ d’application de la directive 98/6.

61 Par conséquent, une telle réglementation nationale interdisant de manière générale des pratiques non visées à l’annexe I de la directive 2005/29, sans procéder à une analyse individuelle du caractère «déloyal» de celles-ci à la lumière des critères énoncés aux articles 5 à 9 de cette directive, se heurte au contenu de l’article 4 de celle-ci et va à l’encontre de l’objectif d’harmonisation complète poursuivi par ladite directive même lorsque cette réglementation vise à assurer un niveau de protection plus élevé des consommateurs (voir, en ce sens, arrêt Plus Warenhandelsgesellschaft, EU:C:2010:12, points 41, 45 et 53).

62 S’agissant de l’argument lié aux effets de l’arrêt GB-INNO-BM (EU:C:1990:102), il convient de souligner, à l’instar de la Commission, que les circonstances de l’affaire ayant donné lieu audit arrêt diffèrent de celles ayant justifié l’introduction du présent recours. En effet, dans cette affaire, la Cour avait constaté que la libre circulation de marchandises s’oppose, en principe, à une législation nationale refusant aux consommateurs tout accès à certaines informations, alors que la directive 2005/29, ainsi qu’il ressort de son article 1er, a comme objectif de «contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur et d’assurer un niveau élevé de protection des consommateurs».

63 Toutefois, selon une jurisprudence constante de la Cour, toute mesure nationale dans un domaine qui a fait l’objet d’une harmonisation exhaustive au niveau de l’Union doit être appréciée au regard des dispositions de cette mesure d’harmonisation, et non pas de celles du droit primaire (voir arrêt Gysbrechts et Santurel Inter, C‑205/07, EU:C:2008:730, point 33 et jurisprudence citée).

64 La directive 2005/29 ayant procédé, ainsi qu’il a déjà été indiqué au point 55 du présent arrêt, à une harmonisation complète de la réglementation en matière de pratiques commerciales déloyales, les mesures nationales en cause doivent par conséquent être appréciées uniquement au regard des dispositions de ladite directive, et non pas à l’aune de l’article 28 TFUE.

65 L’arrêt GB-INNO-BM (EU:C:1990:102), invoqué par le Royaume de Belgique, est sans incidence à cet égard, dès lors qu’il concernait un domaine qui n’avait pas encore fait, à l’époque, l’objet d’une telle harmonisation.

66 Il résulte de ce qui précède que le deuxième grief invoqué par la Commission est fondé.

Sur le troisième grief

Argumentation des parties

67 La Commission fait observer, d’une part, que l’article 4, paragraphe 3, de la loi du 25 juin 1993 revient à interdire en principe, à l’exception de certains produits et services, toute vente ambulante lorsque celle-ci est effectuée au domicile du consommateur pour des produits ou des services d’une valeur totale supérieure à 250 euros par consommateur. D’autre part, cette institution relève que l’article 5, paragraphe 1, de l’arrêté royal du 24 septembre 2006 interdit la vente ambulante d’un certain nombre de produits, tels que les métaux précieux, les pierres précieuses et les perles fines.

68 Rappelant que la directive 2005/29 opère une harmonisation complète et que les pratiques déloyales sont énumérées de manière exhaustive à l’annexe I de cette directive, cette institution relève que les interdictions visées par ces dispositions nationales n’y figurent pas et en conclut que de telles ventes ne peuvent pas être interdites de manière absolue, mais doivent au contraire faire l’objet d’un examen au cas par cas pour déterminer si elles constituent ou non des pratiques abusives devant être interdites.

69 Le Royaume de Belgique soutient, en substance, que tant l’article 5, paragraphe 1, de l’arrêté royal du 24 septembre 2006 que l’article 4, paragraphe 3, de la loi du 25 juin 1993 relèvent du champ d’application de la directive 85/577 et constituent des mesures nationales plus strictes, autorisées dans le cadre de cette directive. En particulier, cet État membre relève que la directive 2005/29 est venue s’ajouter aux dispositions de l’Union déjà en vigueur en matière de protection des consommateurs, sans modifier ou limiter la portée de la directive 85/577 dont le champ d’application est complémentaire à celui de la directive 2005/29.

70 En outre, lesdites mesures nationales relèveraient des mesures de transposition de la directive 2011/83 que cet État membre était tenu d’adopter au plus tard le 13 décembre 2013.

Appréciation de la Cour

71 À titre liminaire, il y a lieu de préciser, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 79 de ses conclusions, qu’il est manifeste, d’une part, que les mesures nationales en cause portant sur l’interdiction de certaines ventes ambulantes relèvent du champ d’application de la directive 2005/29, puisqu’elles constituent des pratiques commerciales au sens de l’article 2, sous d), de cette directive, et que, d’autre part, elles sont susceptibles d’être conformes à la directive 85/577 concernant la protection des consommateurs dans le cas de contrats négociés en dehors des établissements commerciaux, dont la clause d’harmonisation minimale contenue à son article 8 permet aux États membres d’adopter ou de maintenir «des dispositions encore plus favorables en matière de protection des consommateurs dans le domaine couvert par elle».

72 L’article 4 la directive 2005/29 s’oppose au maintien en vigueur de telles mesures nationales plus restrictives, sous réserve de l’article 3, paragraphe 5, de cette directive, selon lequel, «pendant une période de six ans à compter du 12 juin 2007, les États membres ont la faculté de continuer à appliquer des dispositions nationales dont [ladite] directive opère le rapprochement, plus restrictives ou plus rigoureuses que la [même] directive et qui mettent en œuvre des directives incluant des clauses d’harmonisation minimale».

73 Il ressort par conséquent clairement de l’article 3, paragraphe 5, de la directive 2005/29 que les États membres ont uniquement la faculté de continuer à appliquer des dispositions nationales plus restrictives ou plus rigoureuses déjà existantes à la date de l’entrée en vigueur de la directive 2005/29.

74 Or, l’article 4, paragraphe 3, de la loi du 25 juin 1993 et l’article 5, paragraphe 1, de l’arrêté royal du 24 septembre 2006 sont entrés en vigueur respectivement le 4 juillet 2005 et le 24 septembre 2006, soit après l’entrée en vigueur de la directive 2005/29. Dès lors, le Royaume de Belgique n’a pas continué à appliquer une législation existante à la date d’entrée en vigueur de cette directive.

75 Par conséquent, il découle de l’article 3, paragraphe 5, de la directive 2005/29 que celle-ci s’oppose à la législation nationale en question.

76 S’agissant de l’argument du Royaume de Belgique selon lequel la réglementation nationale en cause serait fondée sur la directive 2011/83, il suffit de constater que cette directive n’était pas en vigueur au moment de l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé, le 15 mai 2011, de sorte qu’un tel argument ne saurait prospérer au regard des principes énoncés au point 45 du présent arrêt.

77 Eu égard à ces considérations, il y a lieu de déclarer fondé le troisième grief invoqué par la Commission.

78 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que, en excluant les titulaires d’une profession libérale ainsi que les dentistes et les kinésithérapeutes du champ d’application de la loi du 14 juillet 1991, ayant transposé en droit interne la directive 2005/29, en maintenant en vigueur les articles 20, 21 et 29 de la loi du 6 avril 2010 et en maintenant en vigueur l’article 4, paragraphe 3, de la loi du 25 juin 1993 ainsi que l’article 5, paragraphe 1, de l’arrêté royal du 24 septembre 2006, le Royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 2, sous b) et d), 3 et 4 de la directive 2005/29.

Sur les dépens

79 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation du Royaume de Belgique et ce dernier ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de le condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) déclare et arrête:

1)      Le Royaume de Belgique

–        en excluant les titulaires d’une profession libérale ainsi que les dentistes et les kinésithérapeutes du champ d’application de la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce et sur l’information et la protection du consommateur, telle que modifiée par la loi du 5 juin 2007, ayant transposé en droit interne la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) n° 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil («directive sur les pratiques commerciales déloyales»);

–        en maintenant en vigueur les articles 20, 21 et 29 de la loi du 6 avril 2010 relative aux pratiques du marché et à la protection du consommateur et

–        en maintenant en vigueur l’article 4, paragraphe 3, de la loi du 25 juin 1993 sur l’exercice et l’organisation d’activités ambulantes et foraines, telle que modifiée par la loi du 4 juillet 2005, ainsi que l’article 5, paragraphe 1, de l’arrêté royal du 24 septembre 2006 relatif à l’exercice et à l’organisation des activités ambulantes,

a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 2, sous b) et d), 3 et 4 de la directive 2005/29.

2)      Le Royaume de Belgique est condamné aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure: le français.

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Pratiques commerciales: des dispositions belges jugées contraires au droit européen

10 juillet, 2014 par admin

(Belga) Plusieurs dispositions légales belges ont été jugées jeudi 10 juillet 2014 contraires au droit communautaire par la Cour de Justice de l’Union europeénne.

Celle-ci estime notamment que la Belgique ne peut exclure les titulaires d’une profession libérale ainsi que les dentistes et les kinésithérapeutes du champ d’application de la loi de 1991 sur les pratiques du commerce. Elle juge par ailleurs que certaines dispositions belges sont trop restrictives au regard du droit européen. Il s’agit, premièrement, d’un article prévoyant que toute annonce de réduction de prix fasse référence à un prix défini par la loi (en l’occurrence, le prix le plus bas appliqué durant le mois précédent). Des restrictions à la vente ambulante sont également condamnées. Sont visées ici des articles qui interdisent la vente ambulante au domicile pour des produits ou des services d’une valeur supérieure à 250 euros par consommateur, et ceux qui interdisent la vente ambulante de métaux précieux, pierres précieuses et perles fines.

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Le non conventionnement d’un médecin se présume-t-il?

8 juillet, 2014 par Dr R. BOURGUIGNON

QUESTION :

Cher Confrère,

Suite à un litige concernant un supplément d’honoraire pour une consultation, je sollicite votre arbitrage.

Un médecin conventionné ou partiellement conventionné à l’obligation d’afficher dans sa salle d’attente son statut ; il reçoit à cet effet un papier de l’INAMI.

Concernant le médecin non-conventionné je ne trouve aucun texte OFFICIEL faisant état d’une obligation d’affichage du statut (les mutuelles et Test-Achat l’affirment cependant).

Merci de m’éclairer et de me donner les références éventuelles.

Bien cordialement.

REPONSE :

Je pense que vous avez raison et qu’aucun texte n’impose à un médecin non conventionné d’afficher tel ou tel panneau dans son cabinet afin d’annoncer son statut au regard de la convention.

En d’autres termes, le non conventionnement est en quelque sorte présumé.

L’existence de sites web de mutuelles — et à présent de l’INAMI lui-même* — permettant de connaître le statut du médecin le montre bien.

En revanche, lorsque le dispensateur recourt au régime du tiers-payant, il doit, pour les actes concernés, respecter l’honoraire de la convention.

A noter qu’il existe deux cas de figure permettant à un médecin d’excéder ledit honoraire :

a) exigence particulière ;

b) revenus dépassant un certain niveau** (voir ci-dessous) ;

Accord national médico-mutualiste 2013-2014

8.3.3. Exigences particulières du bénéficiaire

Pour l’application du présent accord pour les médecins spécialistes, les exigences particulières du bénéficiaire sont strictement définies comme suit :

8.3.3.1. le séjour hospitalier en chambre particulière demandé par ou pour le bénéficiaire pour des raisons de convenances personnelles ;

8.3.3.2. les appels à domicile, sauf s’il s’agit de consultations demandées par le médecin traitant ;

8.3.3.3. les prestations aux patients ambulants réalisées à la demande expresse du patient après 21h ou les samedis, dimanches et jours fériés. Ces consultations ne constituent toutefois pas une exigence particulière si elles s’inscrivent dans le cadre du service de garde organisé et si le médecin spécialiste, pour des raisons personnelles, assure des consultations accessibles au public, reçoit sur rendez-vous ou effectue des visites à ces heures et ces jours.

Il est entendu cependant que le malade en traitement, invité à se représenter au cabinet du médecin, ne tombe pas sous l’application de l’exigence particulière.

Conformément à l’article 8 de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient, le médecin doit informer le patient au préalable des conséquences financières de l’exigence particulière posée par ce dernier.

8.4. Les taux d’honoraires et d’indemnités de déplacement prévus par le présent accord sont appliqués à tous les bénéficiaires de l’assurance soins de santé, y compris les bénéficiaires qui ont droit au régime préférentiel tels que visés dans la loi relative à l’assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994, à l’exception des bénéficiaires membres d’un ménage dont les revenus annuels imposables dépassent :

soit 66.708,97 euros par ménage, augmentés de 2.222,83 euros par personne à charge, lorsqu’il n’y a qu’un seul titulaire;

soit 44.472,16 euros par titulaire, augmentés 2.222,83 euros par personne à charge, lorsqu’il y a plusieurs titulaires.

8.5. Les contestations concernant le point 8 feront l’objet d’un arbitrage par un collège paritaire composé par la CNMM et présidé par un fonctionnaire de l’Institut national d’assurance maladie-invalidité.
__________________
* Loi du 7 février 2014 portant des dispositions diverses en matière d’accessibilité aux soins de santé, M.B. 25.02.2014
** Curieusement, les dentistes ne bénéficient pas de cette latitude… on se demande d’ailleurs comment le dispensateur pourrait connaître les revenus de son patient… exprimés à la deuxième décimale !

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« Vol » de radiographies argentiques par un dentiste quittant une pratique de groupe

3 juillet, 2014 par Dr R. BOURGUIGNON et LSD D. HATZKEVICH

QUESTION :

Cher Docteur,

Je me permets de vous contacter pour solliciter votre avis concernant la conservation des radiographies intrabuccales au cabinet dentaire.

Nous avons un dentiste qui a arrêté sa collaboration (unilatéralement, du jour au lendemain) chez nous, en emportant avec lui les clichés argentiques intrabuccaux réalisés pendant ses quatre années de collaboration.

Normalement les radiographies font partie du dossier médical à conserver au cabinet (pratique de groupe) et éventuellement une copie est fournie au patient (sur sa demande) lorsqu’il souhait de changer de dentiste/cabinet.

Le dentiste en question refuse de les restituer : pour moi, c’est du vol. Est-ce exact ?

Merci d’avance

REPONSE :

Une grande partie de cette question a déjà été traitée dans notre News du 14 juillet 2008 intitulée Où conserver les documents médicaux en cas de cession de cabinet ?

La question du lieu de la conservation des documents médicaux – et donc de la personne qui en a la garde – a une incidence très nette sur le déroulement d’une enquête menée par le SECM.

Un dentiste vend son cabinet : doit-il emporter avec lui les fiches dentaires des patients (que le nouveau dentiste voudra consulter pour traiter ceux qui continueront à se présenter au cabinet) ou doit-il laisser ses archives sur place ?

Dans cette seconde hypothèse, c’est au dentiste cessionnaire que le SECM devra réclamer la mise à disposition des documents concernant la pratique de l’ancien occupant des lieux !

Cette question a reçu un commencement de réponse avec… la question posée en septembre 2007 au CTM :

L’article 1er § 12 de la NPS dispose que la prescription et le protocole doivent être conservés pendant deux ans « par le radiologue ».

Dans le cas d’une institution (p.ex. une policlinique ou une pratique de groupe) au sein de laquelle un radiologue est actif, que convient-il d’entendre par les mots « par le radiologue » ?

Les documents susvisés peuvent-ils être conservés au siège de l’institution où le patient a fait l’objet de l’examen par le radiologue, ou doivent-ils être archivés au domicile privé du radiologue?

En effet, du point de vue de l’efficacité et de la continuité des soins, la conservation de ces documents au domicile du radiologue plutôt que sur le lieu de sa pratique médicale pose problème.

Réponse du CTM en sa séance du 13 décembre 2007 :

La prescription et un double du protocole doivent être conservés dans l’institution où la prestation a été effectuée.

Le terme « institution » désignant indifféremment l’hôpital, la polyclinique ou même le simple cabinet du dispensateur (article 1er de la NPS), on peut, par analogie, dire que le dentiste cédant doit laisser ses archives sur place, sous la garde de son successeur.

Il n’en irait évidemment pas de même si le dentiste fermait purement et simplement son cabinet, sans le confier à aucun repreneur !

Cela étant, que convient-il de faire dans le cas d’espèce que vous décrivez ?

Dans la mesure où le dentiste belge n’est pas (encore) inscrit à un quelconque Ordre professionnel, il y a trois solutions : l’INAMI, la Commission médicale provinciale (CMP) et… la police.

Ces trois solutions ne s’excluent pas mutuellement et le but recherché n’est pas tant de récupérer les données subtilisées que de se « couvrir ».

Se couvrir vis-à-vis de l’INAMI n’est que partiellement logique, car c’est le dispensateur lui-même qui sera éventuellement poursuivi et non le cabinet ; il faut cependant garder à l’esprit l’article 164 de la loi ASSI (solidarité en cas d’application du tiers-payant avec perception par le centre dentaire via ASD mod. F).

Dans le cas présent, la plainte auprès de la police sert plus à enregistrer un fait avec une date certaine qu’à quoi que ce soit d’autre. Mais cela a son poids…

En revanche, la CMP dispose de plus de pouvoirs à l’encontre d’un dentiste, et sa saisine permet sans doute de bien se couvrir vis-vis des patients (responsabilité civile, droits du patient).

Nous éviterions donc d’alerter l’INAMI, lequel n’est pas réellement compétent et pourrait en revanche déclencher une enquête réalité-conformité…

Il est à noter que le problème ne se pose pratiquement plus en cas d’utilisation d’appareils digitaux !

Il faut aussi se demander pourquoi le dentiste concerné a agi de la sorte : prépare-t-il un détournement de clientèle ou veut-il se prémunir contre une enquête du SECM qu’il pense imminente ? s’agit-il d’une mesure de rétorsion ?

Télécharger : Décision CTM.pdf

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Cumul d’une consultation et d’un acte technique

2 juillet, 2014 par Dr R. BOURGUIGNON

QUESTION :

Bonjour Dr Bourguignon,

Peut-on cumuler les codes 102616 (consultation) et 473174 (coloscopie totale) le même jour?

Bien à vous.

REPONSE :

A moins que la consultation ne se confonde avec la préparation de la coloscopie, rien ne s’y oppose.

C’est essentiellement en dentisterie qu’une telle interdiction existe : le dentiste ne peut en effet porter en compte une consultation classique (acte au demeurant peu fréquent en dentisterie…) qu’en combinaison avec un autre acte de diagnostic (radiographie, détermination de l’index DPSI).

Une circulaire de l’INAMI a même précisé que la consultation du dentiste ne pouvait être cumulée avec un acte gratuit ou non remboursé !

La ratio legis de cette interdiction réside d’une part dans la sphère très restreinte des soins dentaires et d’autre part dans l’existence de nombreux actes dentaires non remboursés* (prothèses fixes, implants, etc.).

Cela étant, certains acte médicaux, comme le monitoring de Holter, comprennent la consultation :

476210 476221  Monitoring de Holter : Enregistrement électrocardiographique continu pendant 24 heures au moins, au moyen d’un appareil portable à bande magnétique ou à mémoire interne, y compris la consultation lors de la pose et de l’enlèvement de l’appareil, avec protocole et possibilité de reproduire les tracés complets K 64
___________________
* L’acte non remboursé deviendrait ainsi — par le truchement du remboursement de la consultation — un acte partiellement remboursé…

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