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A quand les dentistes-inspecteurs du SECM ?

2 décembre, 2009 par Tiers Payant

Lorsqu’on consulte des dossiers au greffe du SECM, on peut apprécier le travail des médecins-inspecteurs, tout en déplorant que la méthode qu’ils utilisent est complètement dépassée sur le plan scientifique : le même type d’enquête aurait pu être mené au temps de Louis XVI…

En effet, les dossiers du SECM sont essentiellement composés d’auditions de patients et de « constats dentaires » établis par un médecin-inspecteur dépourvu de formation en dentisterie*.

Ne serait-il pas plus fiable de recourir aux services d’un dentiste-expert – ce que le SECM fait dans certains cas – ou à tout le moins de réaliser un cliché panoramique de contrôle (le SECM dispose à cet effet d’un orthopantomogramme) ?

Mais, cette méthode est surtout totalement inadaptée à la patientèle de certains dispensateurs « sociaux » : personnes très défavorisées, immigrés ne connaissant pas le français, toxicomanes, etc.

Le niveau intellectuel, les connaissances médicales de ces personnes défavorisées – souvent illettrées, voire même totalement incapables de s’exprimer en français, parfois toxicomanes – sont donc très faibles.

Comment peut-on attendre de ce profil de patientèle qu’il décrive avec précision, plusieurs mois après les soins, les prestations réalisées par un dentiste dans une partie du corps – la bouche – qu’il ne voit même pas ?

Ces personnes ont en outre peur – comme leur en menace la lettre de convocation du médecin-inspecteur – de voir leur droit aux prestations de santé suspendu en cas de « surconsommation » : elles vont donc minimiser les soins reçus pour ne pas être inquiétées.

Le cas extrême est celui de Fadma M., qui ne parle ni ne comprend un seul mot de français, et dont la traduction est assurée… par un enfant de douze ans (sic) !

Cet enfant de douze ans s’exprime d’ailleurs – comme du reste tous les autres patients auditionnés par le SECM – dans un français digne de Baudelaire quant au style et digne d’un étudiant en 3ème candi médecine quant au vocabulaire médical !

Sans nier le travail des inspecteurs, peut-on réellement considérer que de tels PVA reflètent la réalité ? Est-il crédible qu’un enfant de douze ans dont la mère ne connaît pas un seul mot de français use d’un langage aussi relevé ?

N’eût-il pas été plus simple pour tout le monde que le SECM réalise un cliché radiographique de contrôle, alors qu’il dispose d’un orthopantomogramme ou qu’il peut adresser les patients à un dentiste-expert ?

En ce qui concerne les constats dentaires, on peut soutenir qu’un médecin-inspecteur du SECM ne disposant d’aucune formation en dentisterie peut facilement passer à côté d’obturations (au sens large de ce terme**) réalisées à l’aide de matériaux composites.

En effet, c’est précisément le but recherché par cette technique relativement moderne.

Dès lors que la teinte du composite est la même que celle de l’émail de la dent obturée, et dès lors que l’obturation respecte la structure morphologique de la dent dans le cas des restaurations, l’intervention du dispensateur est imperceptible, excepté pour un autre dentiste et sauf à utiliser la sonde ou certains appareils spécifiques (radiographie, émetteur de lumière noire***).

Certains résines composites « haut de gamme » de la dernière génération sont même totalement indétectables à la radiographie ou à la lumière noire ; en outre, si l’obturation est de petite taille, le dentiste-expert devra s’aider d’une loupe !

Il est cependant des cas où le produit composite est tout bonnement indécelable****, quel que soit l’instrument utilisé, sauf à extraire la dent !

Pour ce qui est des obturations attestées sur des « dents arrachées », il s’agit essentiellement d’un problème de numérotation : en effet, il est bien connu que lorsqu’une dent manque, les dents voisines se rapprochent*****, si bien que l’on commet aisément des erreurs de numérotation – surtout si l’on n’est pas soi-même dentiste.

On lira sur ce sujet la News du 16 juillet 2009 Sur la fiabilité des témoignages des patients… et celle du 24 septembre 2009 Contrôle SECM chez les dentistes et matériaux composites.
___________
* Le SECM semble compter un ou deux médecins-inspecteurs licenciés en sciences dentaires. L’un de ces médecins-dentistes, de surcroît parfait bilingue, le Dr Jean-Philippe MOUSSET, n’effectue plus de contrôles suite à un accrochage avec SECURIMED, en 2004… A quand les dentistes-inspecteurs ?
** A savoir les obturations de cavité au sens strict et les reconstructions (ou « restaurations » dans le vocabulaire INAMI).
*** La lumière noire est également utilisée dans les détecteurs de faux billets : les euros portent des impressions à l’encre invisible à la lumière naturelle, qui deviennent visibles à la lumière noire…
**** Souvent, les caries débutent aux endroits que la brosse ne parvient pas à atteindre, c’est-à-dire au niveau des points de contact entre deux dents voisines. Or, les toutes petites caries ne sont pas visibles à la radiographie et ne se manifestent cliniquement que par une coloration de l’émail : si une carie du bord distal de la première molaire (36) devient suffisamment grande pour déranger le patient ou être détectée par le dentiste, celui-ci est obligé de pénétrer dans cette dent par sa face occlusale (donc par le haut). Lors du nettoyage de la carie de la 36, la paroi mésiale de la 37 devient visible à son tour, et le dentiste peut y découvrir une seconde carie, débutante, qui sera obturée à l’aide d’un composite présentant une surface aussi réduite que 1,5mm² ; après la restauration du grand délabrement de la 36, l’obturation de la 37 est forcément totalement masquée !
***** Ce phénomène se nomme « mésialisation » : les dents ont tendance à migrer vers la ligne médiane.

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Sur une sélection de patients opérée par le SECM…

2 décembre, 2009 par Tiers Payant

Le SECM peut utiliser des techniques « statistiques » afin de ne pas obliger ses inspecteurs à examiner des centaines de patients durant des mois d’enquête : il serait vain de contester ce principe devant les juridictions administratives de l’INAMI.

Cependant, si le SECM recourt à de telles techniques, il doit alors en respecter scrupuleusement la méthodologie.

Pour être « représentatif », un échantillon doit notamment être :

– suffisamment grand (= comprendre suffisamment de patients) ;
– sélectionné d’une manière aléatoire (“at random”) : ce doit être le hasard (et non le SECM) qui choisit les patients incorporés dans l’échantillon – et donc dans l’étude ;

Et encore la représentativité de l’échantillon n’est-elle garantie qu’avec une marge d’erreur – appelée « intervalle de confiance » – le plus souvent de 5% (une marge d’erreur plus petite nécessiterait l’incorporation d’un beaucoup plus grand nombre de patients).

Autrement dit, même si une étude est menée correctement du point de vue statistique, il suffit d’en réaliser vingt pour en obtenir une dont les résultats soient diamétralement opposés à ceux des dix-neuf autres !

Lors d’une audience qui s’est tenue le 1er octobre 2009, tant le médecin-directeur que le juriste représentant le SECM ont avoué n’avoir aucune formation en statistiques.

Le médecin-directeur a également déclaré que le médecin-inspecteur titulaire de l’enquête ne disposait d’aucune connaissance dans ce domaine.

Dès lors, c’est nécessairement aux dépens du dispensateur que le SECM s’est aventuré dans un domaine aussi complexe que la composition d’un échantillon « représentatif » (et dont on ignorait même jusqu‘à l’intervalle de confiance…).

Le SECM n’avait pas calculé moins de… trois coefficients d’extrapolation distincts dans ses différents PVC et autre Note de synthèse, mais tous à la quatrième décimale (sic), ce qui est évidemment une manière de paraître précis quand en réalité on n’est sûr de rien !

La sélection opérée par le SECM était en l’occurrence totalement biaisée, puisqu’elle ne comportait que les cas les plus « lourds » sur le plan médical, à savoir des patients ayant subi de nombreuses prestations en raison de l’état de leur dents.

Le SECM lui-même reconnaissait dans sa Note de synthèse avoir exclu a priori de la sélection les enfants et les personnes âgées et surtout n’avoir retenu : « [que] les assurés pour lesquels ont été remboursées un nombre substantiel de prestations d’obturations et de restaurations ».

En outre, bien qu’incorporée au départ dans la sélection, la patiente chez qui une prothèse avait été placée… en avait été chassée au motif que la prothèse attestée était bien réelle et conforme (sic), si bien qu’on aboutissait au nombre bizarre de 29 (30 moins 1) patients incorporés dans l’étude !

C’est dire si la sélection de cas était le fruit du hasard !

Cet argument fondamental fut avancé par le dispensateur devant la Chambre de première instance (CPI).

Dans sa décision du 12 novembre 2009, la CPI écrit (page 7) :

De même, le fait que les patients aient été sélectionnés pour partie sur la base d’un grand nombre d’obturations réalisées n’apparaît pas biaiser la projection à l’ensemble de la patientèle de monsieur A. La Chambre relève du reste que la proportion de prestations non effectuées est globalement très comparable, au sein des 30 patients entendus, chez ceux qui ont reçu peu de soins et chez ceux qui en ont eu davantage. Ces constats permettent également d’écarter la demande de désignation d’un expert statisticien faite par monsieur A.

La CPI reconnaît donc elle-même que la sélection a été biaisée par l’incorporation de cas « lourds », mais elle compare ensuite ces cas « lourds » entre eux pour décider que les cas « lourds » sont représentatifs des cas « légers » !

La CPI montre ainsi – à l’instar du SECM – sa méconnaissance de la méthodologie statistique : ce n’est évidemment pas parce qu’au sein de l’échantillon des 29 patients, 18 cas concerneraient par exemple 13 prestations et 11 cas 8 prestations, que l’ensemble de la patientèle du dispensateur se composerait de patients à 13 ou 8 prestations !

Toute patientèle un tant soit peu importante – a fortiori s’il s’agit de personnes défavorisées – comporte nécessairement des cas plus graves que la moyenne : ainsi, sur une période déterminée, on pourra toujours recenser cinquante à soixante cas « lourds » au sein de 1.500 à 2.000 patients actifs.

Il s’agit de patients qui, par négligence, ont laissé s’accumuler les caries et autres pathologies bucco-dentaires, ou qui souffrent de certaines pathologies spécifiques : bruxisme, diabète non traité, traumatisme, vendeuse de sucreries trop gourmande, etc.

Si l’on se place du point de vue du SECM – et c’est la raison pour laquelle la sélection opérée par lui comporte tant de cas « lourds » – il est évident que la possibilité ou la probabilité de fraude (ou d’oubli d’une prestation parmi tant d’autres) est d’autant plus grande que les prestations sont nombreuses et/ou onéreuses.

Avaient donc été délibérément exclus de la sélection de patients opérée par le SECM :

– les enfants, présentant dans ce milieu social des pathologies dentaires moins dramatiques que les adultes – en tout cas en ambulatoire* ;
– les personnes âgées, portant souvent des prothèses ;
– les patients d’âge mûr porteurs de prothèses ;
– les patients ayant subi peu d’obturations et/ou de petites obturations, soit les cas « légers » ;
– les patients ayant seulement consulté et/ou subi une ou plusieurs radiographies ;

Tous ces patients exclus de l’étude représentaient quelque 90% du total de la patientèle du dispensateur !

Comment veut-on, au départ d’un échantillon aussi peu représentatif – puisque fruit d’une sélection arbitraire, défavorable au dispensateur – extrapoler ses caractéristiques à l’ensemble de son profil** ?

Même la CPI reconnait qu’un tel échantillon ne pouvait être projeté sur l’ensemble du chiffre d’affaires du dispensateur (voir page 7, point 12 de la décision de la CPI) :

Par contre, la chambre admet que l’application du pourcentage de prestations non réalisées à l’ensemble du chiffre d’affaire de monsieur A, en ce compris des prestations radicalement différentes des obturations qui ont fait l’objet des vérifications (radiographies, consultations, etc), est critiquable.

La CPI était sur la bonne voie, mais elle n’a malheureusement pas été jusqu’au bout de son raisonnement…

Ce biais méthodologique invalide évidemment d’une manière irrémédiable la représentativité de la sélection et, partant, le coefficient d’extrapolation.

Une autre question qui se posait était de savoir si le SECM pouvait incorporer des cas prescrits dans l’échantillon.

La CPI commet à notre avis une erreur de raisonnement juridique à la page 7 de sa décision, lorsqu’elle admet que des prestations prescrites soient incorporées dans l’échantillon destiné à calculer le coefficient d’extrapolation.

En effet, comme le dispensateur l’a exposé lors de l’audience du 1er octobre 2009, les procès-verbaux de constat des inspecteurs de l’INAMI ne font foi que jusqu’à preuve du contraire (art. 169 loi SSI).

Or, le dispensateur peut difficilement apporter la preuve contraire d’un fait qui ne lui est pas reproché en raison de le prescription biennale !

Incorporer des cas prescrits dans une sélection soi-disant « représentative » revient dès lors à obliger le requérant à apporter la preuve contraire d’un fait prescrit !

Le SECM devait en réalité auditionner les patients endéans le délai légal de deux ans (art.142 §2 de la loi SSI).

Projeter des cas prescrits sur un chiffre d’affaires non prescrit revient ni plus ni moins à contourner la prescription…

On lira aussi sur ce sujet la News du 3 novembre 2008 : Quand le SECM confond étude clinique et contrôle médical…
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* Le seuil de la douleur dentaire plus élevé, combiné à l’appartenance à un milieu défavorisé voire primitif, explique aussi que les cas les plus dramatiques (caries multiples et dents abcédées) chez les enfants ne se manifestent pas au cabinet d’un dentiste « moyen », si ce n’est pour un soin ponctuel ou pour se voir diriger vers un service de narcodontie, car intraitables de manière ambulatoire !
** Cela revient au même de demander aux grands criminels belges, les DUTROUX, FOURNIRET et autre Geneviève LHERMITTE combien de personnes ils ont assassinées, puis faire la moyenne… et projeter celle-ci sur l’ensemble de la population belge : on aboutit ainsi à plus d’homicides que la Belgique ne compte d’habitants !

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