25 mars, 2011 par Dr R. BOURGUIGNON
Sous l’intitulé De la récupération des prestations payées indûment, l’article 164 de la loi SSI dispose :
Sous réserve de l’application des articles 142, § 1er et 146, celui qui, par suite d’erreur ou de fraude, a reçu indûment des prestations de l’assurance soins de santé, de l’assurance indemnités ou de l’assurance maternité, est tenu d’en rembourser la valeur à l’organisme assureur qui les a octroyées. Toutefois, la valeur des prestations octroyées indûment à un bénéficiaire est remboursée par le dispensateur qui ne possède pas la qualification requise ou qui ne s’est pas conformé aux dispositions légales ou réglementaires. Si, toutefois, les honoraires relatifs aux prestations octroyées indûment n’ont pas été payés, le dispensateur de soins et le bénéficiaire qui a reçu les soins sont solidairement responsables du remboursement des prestations octroyées indûment. Les prestations mentionnées sur les attestations, les factures ou les supports magnétiques, qui ne sont pas introduites ou corrigées selon les modalités fixées en cette matière par le Roi ou par règlement, sont considérées comme des prestations octroyées indûment et doivent dès lors être remboursées par le dispensateur de soins, le service ou l’établissement concerné.
En régime du tiers payant, les prestations de l’assurance soins de santé payées indûment sont remboursées par le dispensateur de soins qui ne s’est pas conformé aux dispositions légales ou réglementaires. Lorsque les prestations ont été perçues, pour son propre compte, par une personne physique ou morale, celle-ci est solidairement tenue au remboursement avec le dispensateur de soins. Le Roi fixe les règles selon lesquelles les prestations indûment payées, qui ont trait au budget des moyens financiers attribué aux hôpitaux, défini dans [l’article 95 de la loi relative aux hôpitaux et à d’autres établissements de soins, coordonnée le 10 juillet 2008], et qui sont comprises dans les montants qui sont payés en douzièmes par les organismes assureurs, sont fixées, portées en compte, récupérées et comptabilisées.
Le premier paragraphe concerne donc la perception au comptant, le second celle via tiers-payant.
Dans ce dernier cas, la loi instaure une solidarité entre le dispensateur (médecin, dentiste, etc.) et toute personne – physique ou morale – qui a perçu les honoraires pour son compte propre, c’est-à-dire comme destinataire final des fonds*.
Dans la pratique, cette solidarité est appliquée au pro rata du pourcentage conservé par la partie perceptrice : ainsi, si celle-ci rétrocède 45% au dispensateur, l’INAMI peut – après décision d’une de ses juridictions – récupérer 55% de l’indu chez la première et 45% chez le second.
C’est pourquoi les inspecteurs du SECM demandent toujours aux praticiens qui perçoit leurs honoraires et quelle proportion leur en est rétrocédée ; parfois, ils demandent même le contrat de collaboration.
La partie perceptrice est donc souvent – mais curieusement pas toujours – appelée à la cause en vertu de l’article 143 § 2, notamment lorsque la solvabilité du dispensateur est douteuse :
[§ 2. Le fonctionnaire-dirigeant ou le fonctionnaire désigné par lui communique par lettre recommandée à la poste au contrevenant les infractions qui ont été constatées à sa charge. La même communication est faite, s’il échet, à la personne physique ou morale visée à l’article 164, alinéa 2.
Les communications précitées se font par lettre recommandée à la poste qui seront censées reçues le deuxième jour ouvrable après la date d’envoi.
Il invite le contrevenant ou, s’il échet, la personne physique ou morale visée à l’article 164, alinéa 2, à lui communiquer, par lettre recommandée à la poste, ses moyens de défense dans un délai de deux mois.]
En théorie, cette partie perceptrice peut donc faire valoir séparément ses moyens de défense devant les juridictions administratives de l’INAMI, assistée d’un autre conseil…
Il faut noter que la solidarité ne concerne que l’indu, de nature civile, et non l’amende, de nature pénale, même si certaines décisions du fonctionnaire-dirigeant vont (à tort) dans ce sens.
Evidemment, la partie perceptrice des honoraires pourra intenter une action au civil contre le prestataire fautif afin de récupérer les sommes qu’elle aura été obligée de restituer à l’INAMI, en particulier si la convention de collaboration le prévoit expressément.
Notons pour terminer que, les dispositions de la loi SSI étant d’ordre public, une convention contraire ne serait pas opposable à l’INAMI : ainsi, les parties ne peuvent convenir que l’indu ne sera pas récupéré chez le dispensateur, même si la partie perceptrice « couvre » le dispensateur (cas fréquent dans les hôpitaux employant des médecins sous statut salarié).
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* Ce qui exclut par exemple un Office de tarification percevant les honoraires sur son compte bancaire, puis les reversant à son client : dans ce cas, les fonds ne font que transiter par le compte de cet Office.