20 février, 2013 par Dr R. BOURGUIGNON
QUESTION :
Cher Dr Bourguignon,
Suite à l’obligation d’appliquer les honoraires de la convention en chambre autre que particulière, de nombreux gynécologues s’interrogent. En effet, les gynécologues privés qui vont accoucher leur patiente (rappel personnalisé) peuvent-ils demander un honoraire de prestation personnalisée (HPP) en raison d’une « exigence particulière » de la patiente ?
Cet honoraire serait demandé sous forme d’un pseudo-code via la facturation centrale de l’hôpital ET un « consent form » serait signé préalablement par la patiente, lui laissant le choix entre être accouchée par la garde (tarif de la convention) ou d’opter pour un rappel de son gynécologue (honoraire de prestation personnalisée).
Le code de l’accouchement ne donne droit à aucun code d’urgence lorsqu’il est réalisé entre 21h et 7h ou les jours fériés.
Ce pseudo-code pourrait-il être facturé 24h/24, ou seulement la nuit et les jours fériés?
Si la loi prévaut et qu’aucun HPP ne peut être demandé, cela implique ipso facto d’une part que Madame la Ministre a décidé d’instaurer une médecine à deux vitesses (chambre particulière versus les autres) et d’autre part que les assurances des mutuelles devront « s’adapter » aux suppléments autorisés en chambre particulière, car il est évident que nous nous ferions fort d’informer les patientes de la nécessité d’avoir une assurance « suffisante » afin de couvrir la différence entre les honoraires de la convention et les honoraires dits libres en chambre particulière. Cela me semble aberrant…
REPONSE :
La loi du 27 décembre 2012 portant des dispositions diverses en matière d’accessibilité aux soins de santé prévoit en son article 26 :
Art. 26. L’article 152 de la même loi [relative aux hôpitaux et à d’autres établissements de soins, coordonnée le 10 juillet 2008] est remplacé par ce qui suit :
« Art. 152. § 1er. Cet article est d’application aux patients hospitalisés, y compris les patients admis en hospitalisation de jour pour les prestations définies par le Roi après avis de la Commission nationale Médico-Mutualiste.
Le ministre peut demander que la Commission formule un avis dans un délai d’un mois. Si l’avis n’est pas formulé dans le délai voulu ou si le ministre ne peut s’y rallier, il peut soumettre sa propre proposition à la Commission. La Commission rend alors un avis sur cette proposition dans le délai d’un mois. Cet avis est considéré avoir été donné si l’avis n’a pas été formulé dans ce délai.
§ 2. Les médecins hospitaliers ne peuvent facturer des tarifs qui s’écartent des tarifs de l’accord au cas où un accord visé à l’article 50 de la loi relative à l’assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994, est en vigueur, ou des tarifs qui s’écartent des tarifs qui servent de base au calcul de l’intervention de l’assurance au cas où un tel accord n’est pas en vigueur, que pour l’admission en chambre individuelle. Pour l’application du présent article, on entend par suppléments, les tarifs qui s’en écartent.
La question que l’on doit se poser est de savoir si les « tarifs de l’accord [médico-mutualiste] » — termes utilisés dans la loi — se confondent avec les tarifs publiés par l’INAMI.
En effet, le point 8.3.3 de l’ANMM 2013-2014 énumère une liste limitative de situations (« strictement définies ») constituant des « exigences particulières du bénéficiaire » vis-à-vis du médecin spécialiste.
D’autre part, le point 8.4 dudit accord prévoit que le tarif ne s’applique pas aux « membres d’un ménage dont les « revenus annuels imposables » dépassent :
– soit 66.708,97 euros par ménage, augmentés de 2.222,83 euros par personne à charge, lorsqu’il n’y a qu’un seul titulaire ;
– soit 44.472,16 euros par titulaire, augmentés de 2.222,83 euros par personne à charge, lorsqu’il y a plusieurs titulaires. »
Une patiente exigeant, après hospitalisation en chambre à deux lits, d’être accouchée par un médecin particulier — qu’il s’agisse du gynécologue privé qui suit sa grossesse et a le droit de pratiquer des accouchements dans un hôpital ou qu’il s’agisse d’un membre déterminé du staff de cet hôpital — présente-t-elle une exigence particulière au sens de l’ANMM 2013-2014 et donc de la loi ?
Le point 8.3.3.3 de l’ANMM 2013-2014 oblige de répondre négativement à cette question : ce point ne vise en effet que des patients ambulants, et ce quels que soient l’heure ou le jour des prestations.
En revanche, si la patiente — considérée isolément ou dans son ménage — recueille des « revenus annuels imposables » excédant ceux visés au point 8.4 de l’ANMM 2013-2014, le « tarif de l’accord » ne saurait à notre avis s’appliquer, en raison précisément de la disposition que celui-ci contient.
Par « revenus imposables », il y a lieu d’entendre les revenus bruts diminués des seules dépenses professionnelles (hors impôts, précompte professionnel, versements anticipés, etc… mais en incluant les charges sociales) : ces revenus imposables ne se confondent donc aucunement avec le « net ».
On peut par conséquent conseiller au gynécologue de demander à la future parturiente rentrant dans ce cas de figure* de signer une déclaration selon laquelle ses revenus annuels imposables excèdent les plafonds visés à l’ANMM 2013-2014**.
Cela étant, serait-il licite de facturer un « honoraire de prestation personnalisée » ?
En lien avec l’hospitalisation, assurément non, car la loi l’interdit expressément… et encore moins sous la forme d’un pseudo-code repris sur la note globale d’hospitalisation.
Mais, dans le secret du colloque singulier, certains arrangements sont sans doute possibles, tout en ne perdant pas de vue que beaucoup de futures parturientes disposent d’une assurance complémentaire, laquelle pourra par la suite demander des comptes…
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* A supposer, bien entendu, qu’elle ne demande pas une chambre individuelle pour des raisons de convenance personnelle…
** Il y a là une extraordinaire vue de l’esprit de la part des rédacteurs de l’ANMM : qui connaît — a fortiori à l’avance — son « revenu annuel imposable » et qui connaît les plafonds visés au point 8.4 de l’ANMM 2013-2014… calculés à la deuxième décimale ?
Télécharger : ANMM 2013-2014.pdf